Curieuse et riche d’un passé séculaire, la brasserie Fischer incarne une figure emblématique du patrimoine brassicole alsacien. Née à Strasbourg au début du XIXe siècle, cette maison a traversé les époques et les bouleversements historiques, tout en s’imposant comme un acteur majeur de la bière en France. De son installation à Schiltigheim à ses nombreuses innovations, Fischer a su conjuguer traditions locales et expansion nationale. Aujourd’hui encore, son nom résonne dans l’univers brassicole, témoin d’un savoir-faire transmis et adapté au fil du temps.
À retenir :
- La brasserie Fischer est une institution alsacienne fondée au début du XIXe siècle à Strasbourg.
- Elle s’est développée grâce à l’export ferroviaire vers Paris et à de nombreuses acquisitions régionales.
- Rachetée par Heineken en 1996, la production est désormais assurée sur d’autres sites, mais la marque Fischer perdure.
Les débuts d’une brasserie strasbourgeoise
La brasserie Fischer voit le jour en 1821 sous l’impulsion de Jean-Frédéric Fischer-Garnier. À ses débuts, elle porte un autre nom et s’inscrit déjà dans le tissu brassicole local.
- 1821 : Création de la Brasserie de l’Ours-Blanc à Strasbourg.
- 1838 : Martin Erhard-Weber rachète l’établissement.
- 1840 : La brasserie prend officiellement le nom de Fischer.
Grâce à l’essor du transport ferroviaire, les bières Fischer sont rapidement expédiées vers Paris. Cette ouverture vers la capitale participe activement à son essor au cours du XIXe siècle.
La brasserie déménage ensuite à Schiltigheim, en périphérie de Strasbourg. Ce nouveau site offre plus d’espace, en particulier pour la fermentation en cave, rendue possible par les innovations en matière de froid industriel.
Un accès direct au réseau ferroviaire permet de faciliter la distribution, renforçant encore davantage la position de Fischer sur le marché. En 1867, la reconnaissance est au rendez-vous : la brasserie décroche une médaille d’or à l’exposition universelle de Paris.
Expansion et bouleversements au XXe siècle
Durant la première moitié du XXe siècle, Fischer connaît une période d’expansion rapide, marquée par des rachats stratégiques et une adaptation aux contextes historiques complexes.
Entre 1900 et 1912, la brasserie absorbe plusieurs établissements alsaciens :
- 1903 : Brasserie de la Hache à Schiltigheim
- 1904 : Brasserie de l’Aigle à Surbourg
- Brasseries à Colmar et à Saint-Louis dans le Haut-Rhin
En 1912, Fischer construit sa propre malterie, conçue selon les plans de l’architecte J.L. Langeloth. Ce développement renforce son autonomie et sa capacité de production.
Après la Première Guerre mondiale, la brasserie prend le nom de Bière du Pêcheur, en référence à la signification du mot « Fischer » en alsacien. En 1922, elle continue de grandir en intégrant la brasserie Adelshoffen, dont la bière est encore commercialisée aujourd’hui.
Trois ans plus tard, une icône voit le jour : le Fischermannele, petit personnage assis sur un tonneau, devient l’emblème de la marque et s’inscrit durablement dans l’imaginaire populaire.
Innovations et transmission après 1945
La deuxième moitié du XXe siècle marque le début d’une nouvelle dynamique. La brasserie entre dans une phase d’innovation, tout en préparant sa transmission à un groupe international.
En 1966, la direction est confiée à Michel Debus, figure connue aujourd’hui pour avoir fondé la brasserie Storig. Cette période est marquée par une volonté de moderniser la gamme et d’explorer de nouvelles recettes.
En 1995, Fischer lance une bière qui connaîtra un succès mondial : la Desperados, aromatisée à la tequila. Cette création novatrice marque un tournant dans l’univers brassicole français.
L’année suivante, la brasserie est vendue à Heineken. La production évolue et, en 2009, le site historique de Schiltigheim ferme ses portes. Les installations sont transférées à la brasserie de l’Espérance, toujours à Schiltigheim.
Depuis, l’ancien site de Fischer a fait l’objet de divers projets. L’un d’eux prévoit la transformation des lieux en complexe cinématographique, signe d’une reconversion en phase avec les attentes culturelles locales.
Une marque toujours présente
Malgré la fermeture de son site d’origine, la marque Fischer continue de se faire une place dans l’univers brassicole français. Sa notoriété repose sur un héritage solide et une production toujours active.
- Les bières Fischer sont aujourd’hui brassées à Schiltigheim (brasserie de l’Espérance) et à Mons-en-Barœul (brasserie du Pélican).
- La marque conserve son identité grâce à une gamme fidèle aux recettes originales.
- Son logo et son personnage emblématique, le Fischermannele, restent des repères visuels forts.
La longévité de Fischer illustre la capacité d’une brasserie traditionnelle à s’adapter sans renier ses racines. Elle figure parmi les marques françaises dont la réputation dépasse largement les frontières régionales.
Fischer demeure un nom familier pour les amateurs de bière. Sa riche histoire, faite de reprises, d’innovations et de reconversions, en fait un témoin vivant du brassage à l’alsacienne.
